dimanche 9 mai 2010

Chuleta!


AAHHH le Panama... son canal, ses chapeaux...
la liste de ce que l'on peut rajouter est longue: ses bigoudis, ses Ngobé-Gublés, ses Kunas, ses Emberas, ses cargos, ses pirogues, ses cahutes, ses grattes-ciels, ses chuletas... Le Panama est un pays surprenant.
Après 6 mois d'Amérique Centrale, les pays traversés commençaient à se ressembler. Tous différents mais tous avec de nombreux points communs. On pensait qu'il en serait de même avec le Panama et avant même d'y avoir mis les pieds, on rêvait plutôt de la Colombie, de l'Amérique du Sud, surtout après la lecture des aventures de nos compañeros Julia et Mathieu...
Et bien quelle surprise!

A la Frontière...
Encore un passage en douceur, hormis la traversée du pont qui relie les deux pays. Un pont qui pourrait aisément recevoir la palme du « pire pont », rouillé, avec des trous énornes par lesquels tu ne peux que trop bien voir l'eau qui coule en dessous, et surtout, des camions énormes surchargés de bananes costaricaines, qui font tout trembler au passage Et là, tu commences à implorer tous les dieux de toutes les religions (on sait jamais, y'en a peut-être un qui va marcher), pour arriver entier de l'autre côté. Pire que le vieux pont d'El Palmar Viejo au Guate... sur celui la au moins y'avait que des pépés chargés de tronc d'arbres! Ici, rouille, trous et camions, ça fait peur!
Côté Panama, oh! une indienne en robe rose..... ah punaise, elles nous manquaient les indiennes, on n'en avait pas vu depuis le Guate!

Bocas del Toro
Direction les îles de Bocas del Toro, après avoir négocié ferme un trajet en bus de touristes. Le conducteur nous a discrètement demandé de ne pas payer devant les deux pigeons canadiens qui ont payé 10$ chacun alors que nous on a payé 10$ pour deux!
Direction Bocas donc... avant même de monter sur le bateau qui nous a emmené sur la première île, retrouvailles avec le côté déglingue et plus pauvre d'Amérique Centrale. Des maisons sur pilotis toutes de travers, des ordures, des enfants dans des pirogues...
Et nous y voilà enfin. Bocas town, une ville très jolie avec ses maisons en bois, mais très (trop) gringo.
Notre but était d'aller sur l'île de Bastimentos, plus tranquille paraît-il. La côte Caraïbes ayant un fort taux de précipitations annuel, surtout à l'approche de la saison des pluies, on a retardé notre départ pour Bastimentos et c'est finalement sous un beau ciel bleu et que nous avons profité de la journée sur Bocas. Faut dire, que même farcie de gringos, l'hôtel était quand même très chouette, avec la terrasse sur l'eau, le corail qui poussait sur les pilotis et on pouvait observer les poissons sans même mettre la tête sous l'eau, une Balboa à la main!

Mais c'est en arrivant à Bastimentos que nous avons pris toute la mesure du paradis dans lequel nous étions. Pas de voiture, plein de mômes partout, des parties acharnées de billes, des grosses blacks qui rigolent avec leurs bigoudis sur la tête, des maisons en bois toutes pourries mais très jolies, la bière pas chère,  des petits indiens très souriants, quelques touristes mais pas trop et, zéro gringos...
Entre deux averses,  pour aller à la plage, de l'autre côté de l'île, on se prenait pour des « survivors » de kho-lanta dans la boue. 

Ouais, à Bastimentos y'a tellement peu de touristes que les chemins, ils sont pas fait pour les petits joueurs... tu la mérites la playa! Au passage, minuscules grenouilles « tigrou », oranges avec des petites tâches noires...

On y serait bien resté des années à Bastimentos, on avait tout ce qu'il fallait: hôtel pas cher avec internet illimité et terrasse quasi privée, cuisine, « chinita » qui tenait l'épicerie du bled avec l'essentiel pour cuisiner routard...  la vie, la vrai! Mais il paraît que toutes les meilleures choses ont une fin (il est où celui qui a dit ça? Que je lui casse la tête!!!!!)

Boquete via David
La 2ème ville du pays s'appelle David! Je me souviens avoir longuement observé la carte du monde, qui était bien placée dans notre ancien appart, et m'être dit que pendant notre voyage, on devait au moins aller à jusqu'à David! Et nous y sommes passés. En coup de vent mais quand même!
Sur la route, on a eu tout le temps de découvrir les indiennes Ngobé-Buglé, avec leurs longues robes colorées. Certaines tenues peuvent être très élégantes, mais là, on doit dire que ça fait assez sac à patate criard. Mais peu importe, elles sont belles quand même les indiennes et sourtout, elles sont moins farouches qu'au Guate. Comme quoi l'occidentalisation n'a pas encore contaminé toutes les femmes.

Nous avons attérit à Boquete, le paradis des retraités américains. Climat idéal, pas de chaleur étouffante, coût de la vie relativement faible... Et pour dire, même notre hôtel ressemblait à une maison de retraite!
Mais si la ville de Boquete n'a rien d'exceptionnel, le parc naturel qui se situe tout près, lui, possède un véritable trésors: le quetzal. Le Quetzal est l'oiseau emblématique d'Amérique Centrale en général et du Guatemala en particulier. Nous avons entrepris une ballade sur le sentier dit « des quetzals ». On rêvait d'en voir depuis le début, mais ce drôle d'oiseau se fait de plus en plus rare  dans la région et ne vit que dans les forêts nuageuses d'altitude. Nous avons donc entamé le sentier, en scrutant chaque arbre et en écoutant chaque bruit. Enfin, c'est difficile quand on ne sait pas à quoi ressemble le chant du quetzal! Mais avec un brin de patience et l'ouïe fine, on a fini par en voir un... c'est David qui l'a vu le premier. Avant de partir, j'avais dit, « si je vois un quetzal je pleure! »... je n'ai pas pleuré, mais j'avais les larmes aux yeux tellement j'étais heureuse de voir cet oiseau magnifique et fascinant.

On est resté là l'air béat jusqu'à ce qu'il s'envole........ le reste de la ballade était fort sympathique! Deux petites Ngobé-Buglés, sont venues nous tenir compagnie pendant que nous attendions le bus. Elles étaient si mignonnes et souriantes, on les faisait rire... c'était Marta et Martina! 



Chuleta!
Après Boquete, nous sommes redescendus vers le pacifique sur la péninsule d'Azuero. 1ère étape Chitré. Rien de particulier si ce n'est la chaleur accablante qui te cloue à l'ombre de l'hôtel et les coupures d'eau pendant 24 heures car les réserves sont trop basses... après toute la pluie de la côte Caraïbes, difficile de croire qu'ici, à tout juste 100km à vol d'oiseau, il n'a plut que 2 fois en 4 mois! Bref, pas terrible les coupures d'eau quand tu sues comme un gros dégueulasse toute la journée! Heureusement Mike, notre hôte américain (oui mais lui on l'aime bien!) nous avait gardé un seau d'eau pour se faire un brin de toilette.
Visite du minuscule village de Parita, où le samedi c'est bigoudis! Toutes les bonnes femmes de ce village se trimballent avec des énormes rouleaux sur la tête, c'est à voir!

Puis, visite de la petite et charmante ville Villa de las Santos. On n'a même pas eu le temps d'atteindre la moitié de la rue que, Chuleta!, on se faisait alpaguer par un petit bonhomme. Vous avez rencontré un bavard dans votre vie? Et bien croyez nous, ce n'est rien comparé à Ivan! Prenez ma mère (surnommée Radio M par David!), ma cousine Marie, ma belle soeur Nathalie, ma Karelle et moi même... enfin, toutes les filles réunies, et bien vous êtes loin du compte. Ivan a un débit mots/minutes impressionnant.
Il a commencé par nous offrir un cafecito, que l'on a poliment accepté, et a commencé à nous raconter sa vie. Il nous a fait une démonstration de toupie (il est très fort) et nous a montré son jardin, ses plantations de fruitiers et de plantes arômatiques, puis on a décidé que c'est à lui que devait revenir les graines de radis que Jacques nous avait donné pour qu'on les replante quelque part en Amérique Latine. 

Alors on est allé chercher les graines et on est revenu chez Ivan, plus tard dans la journée. Il nous attendait de pied ferme et nous avait préparé une citronade délicieuse et des mangues toutes fraîche qu'il avait ramasé. On a bien aimé s'installer sur une chaise dans la rue devant la maison, comme des vrais locaux, à regarder les gens passer et à saluer tout le monde!

Comme le village nous plaisait bien, on s'est installés dans un hôtel (ouvert que pour nous!). Une belle maison coloniale bien bordélique avec un lit king size dans lequel on pouvait se perdre!
Ivan nous a emmené en ballade et, Chuleta!, c'était cool. Il nous a montré ses meilleurs coins de cueillette, on est reparti avec un gros sac de mangues et des ciruelas.
On a même trouvé des bouts de poteries pré-colombiennes, mais ça ne lui a fait ni chaud ni froid, car apparement il y avait de vrais trésors et tout ce qui reste ne vaut pas grand chose. Enfin quand même, des bouts de poterie pré-colombiennes, ça fait quelques chose de les ramasser dans la terre!
Après être passés sous ou sur des dizaines de clôtures en barbelés, on a eu droit à la meilleure citronade du monde, avec du « miel » de sucre de canne.
Ivan a mis les petits plats dans les grands pour nous et il nous a même invité à dormir chez lui. On a décliné son offre, car avec tout son blabla l'hôtel restait une échapatoire pour un peu de calme! On a juste accepté son invitation a dîner, avec mise en scène spéciale pour une série de photos souvenirs. Ivan, du haut de ses 63 ans, bientôt 64, nous a aussi préparé de la pulpe de tamarindo avec du miel de canne à sucre, le tout passé au four. Il en avait fait pour qu'on ramène en France à nos familles... mais il ne nous connait pas Ivan, encore 4 mois de voyage avec un tel délice dans le sac... d'ailleurs, on a déjà tout manger!

Ivan est un sacré numéro, il est inoubliable, Chuleta! Je pourrais écrire un blog spécial Ivan.
Vous vous demandez peut être pourquoi je place des Chuletas dans mon texte... Chuleta est l'expression d'Ivan. Au début on ne comprenait pas pourquoi il disait Chuleta à tout va. Il nous a fallu un petit moment pour comprendre qu'il n'employait pas « chuleta » au sens propre du terme (cotelette de porc), mais plutôt comme nous nous dirions « putain ». Et en fait, c'est une expression souvent utilisée au Panama.

El Valle, rencontre avec Rocky Balboa
Pour échapper à la chaleur étouffante de la côte, nous avons pris la route d'El Valle de Anton, un bled à la Boquete mais en mieux. Le village est situé dans le cratère d'un ancien volcan et il y a moins de retraités gringos. Le cadre est splendide et il faisait moins chaud.
Mais, malheur, David a subit une attaque de petites bêtes non identifiées. Il a été pris de fortes démangeaisons et a passé la nuit sur le rocking chair dehors, sans fermer l'oeil, alors que moi, je suis restée dans le lit sans écoper de la moindre piqûre, la vie est injuste! Au petit matin, il est venu en me disant de ne pas avoir peur..... il s'était transformé en Rocky! La paupière énorme, tombante au dessus de l'oeil... aïe! Il ne m'a pas crié «Adrieeeenne », mais franchement, la couleur en moins, c'était ça! Il avait l'oeil, la main, le bras... gonflés.
Moi je dis que c'est normal ce genre de chose, dans un pays où la monnaie nationale et la bière s'appellent Balboa!

Lors d'une sympathique ballade, nous avons grimpé en haut de l'indienne endormie, une montagne qui au loin, ressemble à... vous savez quoi! En route, oh, un collier... ah non tiens, c'est un serpent! Un beau serpent rouge, noir, jaune, rouge, noir, jaune... enfin le genre de bébête qu'on préfère voir morte sans tête (c'était le cas). Paraît que dès que ça a du rouge, c'est pas mignon tout plein et que ça t'envoie vérifier si le paradis existe!

Pour se remettre de tout ça, pause détente aux sources chaudes, avec masque de boue... bin oui, le volcan éteint depuis des milliers d'années chauffe toujours sous terre!

La capitale
Chuleta, quelle ville! D'abord, juste avant d'arriver, on est passés sur le pont qui enjambe le canal le plus célèbre de la planète. Et non chers toulousains, ce n'est pas le canal du midi, qui est vraiment rikiki à côté du géant de Panama. C'est grand, c'est grand!
Juste après le pont, c'est la jungle urbaine. Pas jolie jolie l'arrivée, au milieu des immeubles gris et prêts à s'écrouler.

Mais en continuant un peu, la ville est fascinante. Les vieilles demeures coloniales du Casco Viejo (le quartier colonial) font face, de l'autre côté de la baie, aux grattes-ciel qui pourraient rivaliser avec Manathan ou Hong Kong.
Nous nous installons dans un petit hôtel du Casco Viejo. A l'intérieur même de ce quartier il y a d'énormes contrastes. La plupart des maisons sont en ruines, presque effondrées, et juste à côté il y a les grandes demeures restaurées, comme le palais présidentiel ou l'Ambassade de France! Pas dégueulasse du tout l'ambassade de France d'ailleurs, bien installée sur la Plaza de Francia où trône un beau Coq en hommage à tous ces français morts lors de la construction du canal, face au Pacifique...

C'était vraiment génial de flâner dans ce quartier. On a adoré. Je pense qu'on aurait encore plus aimé si le deuxième jour on avait pu sortir plus de 10 minutes sans que le déluge s'abatte sur nos têtes. Mais de quoi nous plaignons nous, n'a t-on pas trouvé un guide de la Colombie, gratos en plus? Et l'ayudante de bus qui a oublié de nous faire payer les 14 balboas qu'on lui devait... non vraiment, on ne peut pas se plaindre de la pluie. Et puis, Panama City, c'est beau même sous le déluge!

Bienvenus chez les Schtroumpfs
Comme on manquait d'aventures... ça faisait quand même longtemps qu'on n'était pas sortis des sentiers battus, on a décider de partir en expédition chez les indiens Emberas de la région du Darien. Vous savez cette région frontalière entre le Panama et la Colombie, là où s'arrête l'Interamericana, qui n'est que jungle et danger, cette région fortement déconseillée pour raison de sécurité, car là apparemment, on peut croiser des guerrilleros ambusqués derrière un arbre, ou un méchant narco-trafiquant qui n'a pas vraiment envie de tomber nez à nez avec un touriste (ou peut-être est-ce le touriste qui n'a pas envie de tomber sur le trafiquant...) enfin bref... dans le Darien, il y a encore beaucoup d'indigènes, et nous on avait envie d'y aller. Mais comme on n'est pas totalement inconscients, on a trouvé un compromis, on s'arrête avant, dans la communauté d'Ipeti Embera, un village où les gens ont un peu l'habitude de voir du monde, mais pas trop.

Alors on a pris le bus, on a marché et on est arrivés. Dès les premiers pas dans le village on a adoré. Les gens tout sourire, les enfants n'en parlons pas, les maisons sur pilotis sans murs, les toits de palmes... ça dépayse!
On s'est approché de la première tienda pour demander si c'était possible de dormir dans le village. « Mais bien sûr » nous ont répondu des bonnes femmes, mais il faut demander au président du Comité du tourisme et vous pourrez dormir dans la Casa Cultural.

Une dame, Nofelina nous propose de venir manger chez elle en attendant l'arrivée du président, qui est aux champs. Son mari Willio nous accueille vautré dans son hamac. On visite la maison, c'est rapide, y'a qu'une pièce et pas de murs! Comme ça tu peux même visiter la maison des voisins sans y être invité! Non là j'exagère un peu parce que les maisons ne sont pas collées!! Nofe et Willio ont 4 enfants, tous adorables. Après le repas, Nofe et sa plus grande fille nous ont offert un collier de perles et de graines à chacun, puis on est allé faire trempette dans la rivière.

Le président nous dit qu'on peut accrocher nos hamacs moyennant 5 balboas par personne et manger chez une famille pour 2 par personne. C'est vraiment cool!

Alors on s'installe, on accroche nos hamacs de voyage, qu'on se traîne dans le sac depuis le début.
Puis l'infirmière du village nous fait un « jagua » traditionnel Embera. C'est une tradition pour eux de se peindre carrément tout le corps lors de fêtes et de cérémonies. C'est un tatouage qui ne reste que 7 ou 8 jours je vous rassure! 

Sur les marches de notre Casa Culural, la salle des fêtes en gros, située au milieu du village, on voit quelques spécimens passer... des femmes qui se promènent les seins à l'air, avec une jupe pour seul vêtement, des femmes et des enfants peinturlurés de la tête aux pieds... il ne manque que les hommes en slips traditionnels!
Y'a des gosses partout qui courent en culotte, même sous la pluie, tout le village est leur terrain de jeux, la rivière leur piscine... tous passent nous voir, timidement. Ils sont beaux et respirent la santé.

Tecairo, le président du tourisme, nous parle de la communauté, de leurs problèmes vis à vis du gouvernement. Et puis, comme tout peuple indigène qui se respecte, le gouvernement a fait des promesses en 1975, après les avoir virés de leurs terres fertiles pour construire un barrage hydro-électrique, et depuis, ne leur a jamais donné les titres de propriété des nouvelles terres... et les Emberas d'Ipeti ne sont pas à l'abris de se faire virer une nouvelle fois s'ils n'ont pas ces titres. Vous savez quel est le comble de l'Embera viré de ses terres pour un barrage hydro-électrique? Le village n'a pas l'électricité!!! ahahah!
C'est ballot non? y'a des fois on voudrait bien leur botter le cul aux politiciens qui font des promesses!

Tecairo nous parle aussi des enfants qui vont au collège à Torti, un bled situé à 12km d'Ipeti Embera. Et de comment les mômes doivent marcher 2km le matin, attendre le bus qui vient de Panama à 6 heures, qui un coup sur deux ne veut pas les prendre car il est complet ou que les élèves ça ne rapporte pas assez, l'arrivée en retard à l'école, le problème du retour et les 2 km à pied pour rentrer... surtout quand on sait comment il peut pleuvoir ou faire chaud... Ah nous on dit, vive le transport scolaire...

Bonne nuit dans nos hamacs, avec les bruits de la nature... bon ok les vaches qui se prennent pour des singes hurleurs ou des éléphants à 4 ou 5 heures du matin c'est pas génial, mais bon... on croyait que la nuit dans le hamac serait pire!

Ils s'étaient bien gardés de nous dire que leurs « tatouages » détaignent. Nous voilà avec des motifs sur les deux bras, et sur tous les endroits du corps où on a eu le malheur de poser le poignet pendant la nuit... On a l'air fin!
Bienvenue chez les Schtroumpfs. D'ailleurs nous n'avons pas eu l'occasion de rencontrer le Noko, le grand Schtroumpf Embera, mais  on a eu l'honneur de rencontrer l'élite du village qui nous a expliqué tout le fonctionneent de la communauté. Une autre Schtroumpfette a cuisiné pour nous, autre maison sans mur, autre famille, autre bon moment.

Le Darien

On a tenté de s'enfoncer un peu plus dans le Darien. Pas vraiment facile de partir à l'aventure vue la région; ça coute très cher de l'explorer et c'est quasi impossible de le faire sans guide. Alors on s'est contenté d'avancer jusqu'à la Palma, la plus grande ville de la région. Ça n'a rien d'une ville, c'est petit et c'est sympathique si on oublie les ordures qui flottaient dans l'eau et que les WC de l'hôtel (qui est sur pilotis), se déversaient directement en dessous, dans l'eau du fleuve. Mais à part ça, c'était cool.
On est partis à la recherche d'internet car j'étais en retard pour le boulot: le type de l'hôtel nous a dit qu'il n'y avait pas internet. Mais en passant devant la mairie, David m'a dit qu'on pouvait toujours demander... et miracle, les fonctionnaires (pas très actifs!) de la mairie, se sont fait un plaisir de nous prêter un ordi avec wi-fi.

Retour à Ipeti
Après la Palma, nous avons refait une halte d'une nuit à Ipeti, chez nos amis les Emberas. Fallait quand même qu'on les aimes pour se refaire les 2km sous un soleil de plomb, avec nos sacs lourds!
On est arrivés en pleine réunion de village. On pouvait entendre des bribes comme « ils veulent nous diviser », « il faut rester unis », « les commerçants doivent payer des impôts »... on s'est fait discrets et on est allé poser les sacs dans la Casa Cultural... on a fait comme chez nous quoi! Cette fois-ci c'est la femme de Tecairo qui nous a fait à manger. 10 enfants qu'elle a eu la madame, 10!  Pas étonnant qu'elle paraissent choquée quand on lui répond que nous, on en a pas, « pas encore »!

Alors que nous étions en train de déguster notre riz (cultivé sur place) et notre poisson (pêché dans la rivière où on se baigne, lave et où on fait la lessive!) on a entendu une toute petite voix derrière nous qui disait « Dabid ? ». Et là, on a vu Yaki, la dernière de Nofe, qui lance un petit sourire avant de s'enfuir toute timide! Il n'était pas peu fier le « Dabid » que la petite se souvienne de son prénom! Evidemment, moi personne ne se rappelle du mien car personne ne sait le dire, c'est toujours la même histoire:
-        Comment tu t'appelles?
-        David.
-        Et toi comment tu t'appelles?
-        Chloé.
-        COMO??????????? (les yeux s'écarquillent!)
-        C.L.O.E
-        Louis?
-        NON CHLOE!!!

et j'exagère même pas! On m'a même dit que c'était un prénom de garçon.

Quelques villageois sont venus nous serrer la main, nous demander si c'était bien le Darien... Vraiment adorables, tous.
David s'est improvisée infirmier parce qu'un gars s'était coupé profondément les doigts et que la Schtroumpfette  infirmière tardait à venir et ne parlons même pas du médecin qui est à Torti...
Et tout d'un coup, on entend « Cloué »! et oui.... c'est à moi qu'on s'adresse... j'en crois pas mais oreilles! Les filles de Tecairo ont retenu mon prénom et m'appellent même « clou-clou »!

Le soir, autour d'un énorme plat de riz, Tecairo nous pose plein de questions sur la France et nous demande si on a des indiens en France. C'est la première fois qu'on nous demande ça! Et nous de lui expliquer que non, pas d'indiens comme ici!

Au revoir les Embera, et Merci pour votre accueil inoubliable!

Vers la Colombie
Dans ce monde où  on va sur la lune, où il ne faut que 11 heures d'avion pour traverser l'Atlantique, où les transports sont de plus en plus rapides... nous pouvons encore être surpris. La route panaméricaine qui relie l'Amérique du Nord à l'Amérique du Sud, en passant par l'Amérique Centrale et qui traverse tant de pays, s'interrompt brusquement dans le village de Yaviza, dans le Darien, pour ne reprendre qu'à environ 150 km de l'autre côté de la frontière en Colombie. L'espace vierge de route, est communément appelé le « Darien's gap ». C'est une espèce de No Man's Land couvert de jungle où règne la loi de la... jungle, c'est le cas de la dire. La région du Darien étant si « dangereuse », la route n'a jamais été terminée malgré les pressions des grands groupes internationaux qui gagnerait beaucoup à ce que la Panaméricaine soit achevée.
Oublié donc le passage de la frontière de façon traditionnelle (en bus). Il existe bien entendu d'autres solutions:
·         solution n°1: l'avion à 150$ (pas cher, rapide, mais trop facile)
·         solution n°2: la croisière en voilier à 400$ (confortable, 5 ou 6 jours, mais trop cher et pas assez aventure)
·         solution n°3: la croisière en bateau mini-cargo de livraison sur les îles San Blas (pourquoi pas mais on n'a pas trop d'informations, coût 50 à 60$, durée 5 jours)
·         solution n°4: on va sur les îles San Blas et on verra bien, on finira bien par arriver en Colombie (coût inconnu, durée inconnue)

Allez, après un temps d'hésitation, mais avec quelques renseignements fournis par Ludivine et Laurent, on se dirige vers les îles San Blas et on verra sur place entre la Solution 3 et 4.

Croisière chez les Kunas version David et Chloé
Pour atteindre l'archipel, le guide parlait d'une piste « où même un tank germanique aurait du mal à passer ».
Nous avons quand même pris le risque de nous poster au croisement de la piste et de faire du stop. Vu l'état de la route, on pensait devoir attendre des heures avant de trouver une voiture assez folle pour s'y embarquer. 10 minutes d'attente et oh miracle, une voiture! Michel, un Venezuelien installé à Panama, et ses trois fils se dirigaient aussi vers les San Blas et nous ont offert de nous tasser à l'arrière de leur voiture avec nos sacs. Super!

Nous voici en pays Kuna. Une autre population indigène panaméenne.
Direction l'île de Carti Suitupo, point de départ ou de passage de quelques bâteaux en direction de la Colombie.
L'archipel de San Blas se compose de plus de 350 îles ou îlots, bien souvent minuscules, couverts de maisons en bambous et toits de palmes, ou sauvages et justes recouvertes de cocotiers, dans une eau bleue turquoise. Autant dire, un coin de paradis où les Kunas régnent en maîtres avec un statut d'autonomie qui fait qu'il n'y a ni les flics ni l'armée. Ici le grand Schtroumpf de chaque communauté s'apelle le Saila et il représente l'autorité spirituelle.

En arrivant sur Cati Suitupo, on s'est renseigné sur les mini-cargots, mais personne ne savait quand il en passerait un. Et 5 minutes après notre arrivée, une petite lancha (barque) s'est amarrée au quai et le type nous dit qu'il allait  à Puerto Obaldia, le dernier village avant la frontière. Il nous a proposé de nous embarquer moyennant 100$ par personne. Dis donc petit Kuna, ça fait bien cher pour ta petite barque!
Mais un « homme d'affaire » (le gérant d'un petit hôtel) a négocié avec nous et a fait baisser le prix à 60$. Là ça nous interessait plus. Départ à 13heures, juste le temps de manger, c'était parfait.
Mais qui dit lancha, dit solution n°4, c'est à dire que la durée du voyage restait un facteur inconnu, la frontière étant située à une centaine de kilomètres, mais le moteur de lancha... est un moteur de lancha, donc pas rapide. Il nous annonce le programme: 1er soir dodo sur Isla Tigre (ça tombe bien, on voulait y aller) et puis ensuite, Puerto Obaldia.

C'est parti mon kiki. La pause sur une île de rêve, sable blanc, eau turquoise et cocotiers était fantastique. Un petit peu avant d'arriver sur Isla Tigre, Filencio, le capitaine nous dit: ce soir on dort sur Isla Tigre, demain on dort dans mon village à Carreto et après demain on arrive à Puerto Obaldia. Ah bon? Une étape dans ton Village? Mais tu nous l'avait pas dit ça... et on peut y dormir au moins dans ton village? (on n'a même pas posé la question, on allait bien voir demain!).

Contrairement aux Emberas, les Kunas ne sont pas très ouverts, je dirais même plus, ils ne sont pas ouverts du tout. Accroches-toi avant d'avoir un bonjour et un sourire. Heureusement les enfants d'Isla Tigre ont été bien dressés à l'école et tous te disent Hola, mais les adultes, c'est une autre histoire. Il paraît que le Saila interdit aux femmes de parler avec une personne non Kuna. Et il est interdit de prendre un Kuna en photo (bon si tu lâches 1$ ça devient négociable!) Leur village était très joli, des petites ruelles de sable toute bien arrangées, sans ordures... Mais oui tiens, où sont-elles les ordures, Suis-je bête? Elles sont dans la mer of course!


Les Femmes Kunas sont des professionnelles de la couture et confectionnent des « molas ». Des tissus cousus entre eux qui représentent des formes très jolies. Je trouve que c'est l'un des plus beaux artisanats d'Amérique Centrale. Les femmes le portent cousu sur leur sorte de tee-shirt. D'ailleurs les tenues traditionnelles des femmes Kunas sont les très belles, très colorées, et elles portent aussi beaucoup de perles aux chevilles et mollets et aux poignets. Elles ont les cheveux courts, et sont souvent belles (enfin pas du goût de David). Evidemment la seule Kuna qu'on a pu prendre en photo de près parce que je lui ai acheté des molas, est la moins jolie que l'on ai vue! D'ailleurs vous pouvez voir une Kuna  presque sourire!!!!

Le lendemain on a retrouvé Filencio à 6heures du mat. C'est une longue journée de bâteau qui nous attendait. Un voyage 9 heures de barque jusqu'à Carreto il avait dit... ça sera 11h30 -les pauses = 10heures sdans la lancha.
Ça fait mal aux fesses 10h de lancha. La planche en bois a presque fini incrustée dans nos postérieurs. Mais quel voyage! Naviguer entre les îles, suivre la côte sauvage, voir le ciel orageux au loin et se dire « chuleta on a de la chance la pluie est au large! », puis « Chuleta on a de la chance la pluie est sur la côte », puis « Chuleta, on ne pouvait pas y échapper, maintenant on est en plein dedans! ».
Et enfin nous sommes arrivés à Carreto. Un tout petit village Kuna sur la côte, coupé du monde, entouré de mer, de forêt et de montagnes.Dès que la lancha s'est approchée du rivage, quelques habitants sont venus accueillir Filencio et son fils et aider à décharger le matériel qu'il tranportait (panneaux solaire et batteries), et ils ont vu deux touristes, pas prévus! Mais ces Kunas là, ont été souriants. Au moment même où nous avons posé les pieds sur la plage de Carreto, nous ne savions toujours pas où nous allions dormir, car on se doutait bien que c'était pas le genre de village où il y avait un hôtel. Filencio nous a alors dit qu'on allait dormir chez lui. Deux mômes nous y ont conduit et on a été accueilli par sa femme, Ildaura, qui a dérogé à la règle et nous a timidement parlé et offert un chocolat chaud. Ah que c'était bon après la  lancha et la pluie!

Filencio nous a indiqué un l'endroit où accrocher nos hamacs et nous a offert à manger (bananes plantains bouillies et poisson bouilli). Nous avons un peu discuté avec l'instit du village, une Kuna « rebelle » qui parle aux étrangers et ne porte pas la tenue traditionnelle, elle parle Espagnol, ça aide, la majorité des Kunas ne le parle pas. Pendant ce temps, à la lueur d'une petite lampe, Ildaura cousait un mola. Ildaura nous a aussi servi une mixture chaude et sucrée avant de dormir.
Dans l'obscurité, l'instit nous a améné voir des danseurs et musiciens Kunas qui répétaient leur danse en s'amusant. Il paraît qu'il y a des concours entre communautés. Mais les hommes qui tenaient une réunion « sérieuse » leurs ont demandé d'arrêter. C'était court mais génial de voir ça, presque incognitos puisque pas d'électricité. Vous avez demandé une soirée typique? Vous êtes servis!

Puis dernier bout de mer, spectaculaire, départ à 6 heures du mat et incroyable lever de soleil sur la mer. On se serait cru dans un dessin et sur une mer aussi fausse que celle de Felini dans « E la nave va ».
Et nous avons atteint le but de ces 3 jours en lancha, Puerto Obaldia. Attendez, et là vous croyez que ça y est... mais non, c'est pas fini, Puerto c'était juste une étape de plus avant la Colombie. L'étape où on fait tamponner son passeport par le service de « migracion » et où le douanier te demande où tu vas regarder le mondial de foot! Après il faut encore attendre une lancha pour aller en Colombie. Et ici y'a pas d'heure pour les lanchas, on te dit « ahorrita », le mot favori des latinos, qui veut soit dire « tout de suite » (au sens propre du terme) soit « tout à l'heure » soit « demain »... à vous de vous débrouiller!

La lancha on l'a attendue et elle est arrivée ahorrita, après 6 heures seulement d'attente! On a embarqué et on est en Colombie... Yeah! Adios l'Amérique Centrale, Bonjour l'Amérique du Sud... la suite au prochain numéro.



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