samedi 19 juin 2010

¡Chevere!

Le jour où on part en voyage, on est heureux... on sait que l'on va vivre des choses inoubliables, qu'on va faire des rencontres, qu'on va s'en mettre plein les yeux. Mais, le jour où on part, quand on dit au revoir à nos amis, à nos familles, on pense aussi aux mauvaises choses qui pourraient leur arriver en notre absence, car après tout la Terre continue de tourner.


Et la Terre a tourné, elle a emporté ma Tata Nounouche et le putain de nénuphar qui la rongeait. C'est la vie il paraît. Mais depuis la Colombie d'où j'écris ce message, je veux dire à quel point je l'aimais, et à quel point elle va me manquer. C'était une Tata farcie, une Tata avec un rire qui fait rire, une Tata sympa, une Tata avec un caractère Lledos redoutable, une Tata drôle, une Tata unique... C'est dur d'être loin, mais c'est ça aussi le voyage, c'est ça mon voyage.

Tata, on a bu un coup de rouge en pensant fort à toi.

Hasta Luego Tia, Que le vaya bien, comme ils disent ici. En attendant, on va continuer notre route.

Et ça continue...Chevere!

A la frontière...

La Colombie ayant une réputation (pas volée) de paradis de la cocaïne, sortir du pays pourrait rendre parano un Petit Chanteur à la Croix de Bois, qui imaginerait qu'on a glissé un sachet de poudre blanche sous son aube. Après une fouille de sac très brève, le douanier n'a même pas ouvert le sac de David, nous voilà de retour au Venezuela!

En mars 2008 David et moi nous étions envolés pour 3 semaines et demie au Venezuela. Premier voyage ensemble et 1er pays d'Amérique Latine pour moi. Le Venezuela faisant deux fois et demie la France, nous nous étions contentés de visiter l'est du pays: de Caracas à El Pauji, en passant par le merveilleux Salto Angel, le géant Delta de l'Orénoque et un peu de Côte Caraïbes. Un sacré voyage!

Maracaibo, Aïe, c'est pas beau

1ère halte: Maracaibo.

10 ou 15 contrôles de police plus tard et une enfilade de panneaux à la gloire du Président Chavez, nous atteignons la 2ème ville du pays. Le bruit et la fumée des vieilles américaines nous envahit, nous monte à la tête. Après le passage dans le merveilleux désert du Cabo de la Vela, la transition est rude. Très rude.

Maracaibo n'a pas bonne réputaion, mais comme dit Georges, la mauvaise réputation...

Et bien, je suis au regret de dire que, selon moi, Maracaibo ne vole pas sa mauvaise réputation... sale, enfumée, bruyante, dangereuse... un vrai paradis quoi. Il reste pourtant quelques jolies trâces coloniales et notamment une petite ruelle fort sympathique et colorée. Mais, à 18h pétante, le centre se vide. De la fenêtre de notre hôtel, nous assistons à « l'évacuation » du centre! Euh mais on doit sortir manger là, c'est pas très très engageant de mettre le nez dehors s'il n'y a plus personne! Heureusement la pseudo boulangerie du coin vend des empanadas et un papi a un petit chariot avec quelques légumes qu'il n'a pas encore remballés, on est sauvé. On a même le temps d'acheter une Polarcita, une petite bière Polar, le pied!

Ma description est négative, David vous dira que ce n'est pas si terrible que ça... On adore les vieilles bagnoles américaines qui datent des années 50 ou 60, qui fument qui pètent qui sont prêtes à rendre leur dernier souffle à chaque feu rouge. Ouh celle là, elle va perdre son coffre... et celle-ci, c'est la portière qui va tomber...

Le lendemain, mission change d'argent. Il y a deux ans, on pouvait changer de l'argent au noir partout. C'était pas très légal, mais qui pouvait résister à un taux quasi deux fois plus élevé que le taux officiel... pas nous! Mais en deux ans les choses ont bien changé... Personne pour nous conduire dans un petit bureau, au fond d'un couloir lugubre, pour nous changer nos dollars (qu'on avait ramené du Panama spécialement pour les changer au noir au Venezuela!). Personne. Mais que ce passe-t-il ici?

On visite un autre joli quartier de Maracaibo, mais un Monsieur nous déconseille fortement de trainer dans le coin. A deux bloc de la Plaza Bolivar, une maison en ruine sert de décharge publique et ça empiète fortement sur la rue. Ça pue, c'est dingue. Mais Hugo, qu'est ce que tu fous bordel? Il te sert à quoi l'argent de ton pétrole???


« Patria socialista o muerte » est ton sloggan, inscrit en gros et en rouge, sur le siège de ta compagnie pétrolière... alors c'est ça le socialisme?
Si le régime chaviste n'est pas une dictature, ça pourrait y ressembler. Le culte de la personnalité à la Staline, ça il sait faire Hugo! Sur chaque panneau, au bord des routes, dans les villes, on a droit à: Chavez qui pense, Chavez qui sourit, Chavez patriote, Chavez le poing en l'air, Chavez avec des jeunes, Chavez avec un petit garçon, Chavez qui joue au baseball (oui, oui, le jeu américain!!), « le président Chavez vous souhaite une bonne route » sur le pont de Maracaibo... du Chavez à toutes les sauces, attention ça peut provoquer une indigestion.


Coro, rencontre avec les « fransouces »

Dès notre arrivée à Coro nous nous faisons alpaguer par un type qui nous propose de changer de l'argent... oh celui-ci on ne le laisse pas passer. Par la même occasion il nous montre une posada fort agréable et pas chère, tenue par un couple franco-venezuelien, Eric et Nela. Après nous avoir fait poireauté toute une soirée, Le type fini par nous proposer 1dollars pour 7 bolivars (contre 1 pour 4,3 au taux officiel). Nela nous explique que depuis une semaine, Chavez a fait passer une nouvelle loi qui prévoit 7 ans de prison pour les venezueliens et 1 an pour les touristes pris en flagrant délit de change au noir. Ouh ça rigole pas! C'est donc pour ça que personne ne propose plus de changer au noir.

Au « Gallo » (coq), la posada d'Eric et Nela, on rencontre deux français, Lisa et Samy, fraîchement débarqués sur le continent sud-américain pour six mois de voyage. On papote, on discute, on raconte, on est bavards!

On décide de partir tous les quatre faire une ballade qu'Eric nous a conseillé. On part donc pour le Chemin des Espagnols, dans la Sierra Nevda de San Luis. Une très belle ballade dans la forêt tropicale, 1ère jungle pour Samy et Lisa. On a droit à nos R2D2, des papillons morphos bleus, des singes hurleurs...

On fait une pause baignade dans de jolies casades, il se met à pleuvoir, on décide de rentrer... et c'est là que les choses se gatent. Pas de bus, pas de taxi, pas de voiture qui s'arrête pour nous prendre en stop... et la nuit qui tombe. L'histoire commence à nous faire moyennement rire. En plus il pleut et on a quand même l'air un peu con tous les 4 avec nos capes de pluie et notre air paumé. Mais coup de bol, à 19h28 très précises, le dernier (et unique!) bus passe et nous ramène à Coro. Nela, à l'hôtel, commençait à s'inquiéter de ne pas nous voir rentrer!

Encore deux journées tranquilles à Coro, avec visite du « désert » aux portes de la ville, qui ressemble plus à la dune du Pila qu'à un désert, mais qui est joli quand même.

Nous décidons de mettre le cap vers les Andes Venezueliennes. Le début (ou la fin, ça dépend d'où on part!) de la célèbre Cordillère des Andes. Un nom qui fait rêver...





Les Andes

Lisa et Samy aussi partent vers Merida, on fait donc la route ensemble. Beaucoup de choses ont changé dans ce pays en deux ans, par contre, il fait toujours aussi froid dans les bus de nuit. Les bus frigos sont toujours là. On s'arme de polaires, vestes, chaussettes, couverture British Airways, et on résiste au froid pendant 12 heures de trajet.

On déconne bien avec Lisa et Samy, ça fait du bien!

La grande attraction touristique de Mérida est son téléphérique. Le plus long et le plus haut du monde... on en rêvait. Sauf que, il est fermé ce fameux téléphérique. Mais pour nous consoler, nous avons pu voir une immense photo du président Chavez, le poing en l'air, avec son béret de révolutionnaire (mes fesses!).


On tente notre 2nde sortie de français jusqu'au village de Mucuchies. Il pleut quand on arrive... décidément! Et moi quand il pleut et qu'on est à près de 3000m d'altitude, j'ai envie de chocolat chaud. Alors, après un chocolat chaud, délicieux, on brave la pluie jusqu'à San Rafael de Mucuchies. A 10h00 de matin, on fait une dégustation de Punch Andin local exquis. On est conquis et à l'unanimité on décide d'acheter une bouteille pour l'apéro du soir.

Très joli village et très jolies montagnes. Enfin je suppose que les montagnes sont jolies, car à vrai dire, on n'en a pas vu grand chose des montagnes. Merci les nuages.

La 3ème tentative a été la bonne... on commence à former une bonne équipe avec Samy et Lisa... Cette fois on s'embarque pour de la vrai montagne. On arrive en bus à 3000m d'altitude. Le décor andin est planté: peu de végétation, quelques buissons et surtout la «frailejon», une plante typique des andes au touché de velour. Il fait beau, ça paraît presque suspect! On commence la ballade, mais on en bave, on sent les 3000m. Le chemin est fabuleux. La vue magnifique sur ces sommets majestueux qui trônent à près de 4000 ou 5000m. Le soleil est toujours avec nous. Il nous chauffe le dos et nous pousse à la sieste dans l'herbe. On à l'impression d'être seuls au monde dans ces montagnes si belles.



On redescend à l'arrêt de bus assez tôt afin de ne pas réitérer la mésaventure de Coro. Le temps se couvre et dès que le soleil disparaît, la température baisse vite. Toujours pleins de déconnade, on regarde de femmes à la 50aine tardive, en train de picoler avec le chauffeur du taxi qu'elles ont embauché. Ça nous semble étrange de voir ces deux bonnes femmes picoler à 3000m, en débardeur, toutes excitées! Soudain elles nous font signe et nous proposent une rasade de leur alcool « barato », (pas cher). Ni une ni deux, tout est bon pour se réchauffer, on y va. Là, nous faisons connaissance du phénomène Lourdes et de son amie Chinita (Chinita -petit chinoise- ou chino -chinois-, sont des noms employés dans toute l'amérique latine afin de désigner tout asiatique ou personne ayant les yeux bridés. Chinita (je ne me souviens plus de son prénom), n'est pas plus chinoise que moi, mais elle a les yeux vaguement bridés alors elle n'y échappe pas et devient « Chinita ». L'alcool nous réchauffe, on fait tourner la bouteille! Lourdes nous plaît. Elle nous explique qu'elle et Chinita sont venues boire en montagne pour respirer l'air pur et s'imprégner de la force des montagnes (ou un truc dans le genre!). Elle est drôle, pleine de vie, elle a l'air chaleureux. Elle nous donne son numéro de téléphone et nous propose de nous louer des chambres dans son hôtel pas officiel.

Le soir, à Mérida, autour de notre bouteille de rhum andin, on décide d'aller chez elle le lendemain. Après tout, c'était une bonne rencontre et pourquoi ne pas connaître Lourdes un peu mieux avant de poursuivre nos chemins.

Quand j'appelle Lourdes, elle a l'air trop contente qu'on la rappelle... Elle vient nous chercher avec son mari Ciro.

Ciro est adorable aussi, mais c'est l'inverse de la tornade Lourdes. Il est plutôt calme, réservé, ne boit pas (plus). Lourdes, institutrice retraitée, nous montre sa belle maison, une ferme et nous offre à boire. La soirée arrosée débute à 15h, je vous laisse deviner comment ça finit!

Il paraît que les français disent toujours Oh la la... balivernes me direz vous, c'est encore un cliché, comme la marinière et le béret... Et bien non. De tout son sérieux, Lourdes nous demande ce que « oh la la » veut dire, car elle a remarqué qu'on le disait sans arrêt. Incroyable, on dit des choses sans s'en rendre compte!

Lourdes nous donne une leçon de cuisine et nous apprend à faire des arepas, une tradition venezuelienne. Délicieuses les arepas de Lourdes. Sa maman nous fait un chocolat chaud divin, et nous partageons tout cela autour d'une tablée avec des amis de Lourdes.

Un monsieur m'entreprend sur la politique... aïe, ça m'intéresse. Profondément déçu du chavisme, il me demande ce que j'en pense. Difficile à dire, car à la base, les idées sont bonnes. Par contre, il semble que question application de ces bonnes idées, senor Hugo mérite une mauvaise note. Un jeune intervient et lui est plus que déçu et traite Chavez de dictateur. C'est vrai que son parti contrôle l'exécutif, le législatif et le judiciaire, difficile de croire à un régime juste. Ciro non plus n'aime pas Chavez. Il n'y a que Lourdes qui est 100% chaviste, ça doit être à cause de la cocaïne qu'elle sniffe de temps à autre, mais malgré tout Lourdes est une femme géniale.

La soirée se termine sur des airs de guitare joués par Samy... on a tous la paupière alcoolisée et lourde.

Nous disons au revoir à Samy et Lisa, nos chemin se séparent ici, mais on espère les recroiser avant la fin de notre périple. Ils vont en Colombie, on va à Caracas voir nos amis François et Noris. Bonne route les jeunes, et à bientôt!

Caracas

12 heures de bus plus tard et nous voici à Caracas. François vient nous chercher au petit matin et nous ramène chez lui. Il annonce la couleur dès le début, on ne parle pas de politique à la maison. Il est extrêmement déçu par Chavez mais Noris est Chaviste et la politique déchaine les passions chez eux aussi. On peut parler de lui sans prononcer son nom, on dira juste « tu sais qui »; il est pire que Lord Voldemort.

Nous retrouvons l'appartement, au 19ème étage d'une tour caraquena. Depuis deux ans rien n'a changé, la vue sur la ville qui s'étend est toujours aussi surprenante, l'ambiance toujours aussi chaleureuse, peuplée de souvenir de voyage sur les murs et les meubles. Les plantes du balcon resplendissent. Nous aurons même droit aux fleurs de la Dama de Noche, une fleur qui ne fleurit qu'une fois et qui ne dure qu'une nuit. Noris nous prépare des arepas, comme il y a deux ans, quand ils nous ont hébergés après notre rencontre sur la plage de San Juan de las Galdonas.

Nous pénétrons dans leur monde: découverte du parc et de ses arbres, François, qui vit depuis près de 30 ans à Caracas, fait parti du comité de défense de l'un des plus beaux parcs de la ville, au pied de son immeuble. Il nous fait aussi découvrir le jardin botanique et l'université où il travaille. Il nous parle de la situation du pays et confirme ce que l'on avait ressentit en arrivant.

Quant à Noris, elle a créé il y a longtemps une compagnie de danse, Coreo Arte. Nous avons le plaisir et la chance d'assister aux répétions du la troupe. Nous n'aurons pas la chance d'assister à la 1ère, mais nous nous régalons de voir les danseurs prendre leur pied avec la danse.

Ce passage à Caracas est aussi l'occasion pour nous de découvrir la ville, que nous avions fuit il y a deux ans. Nous apprivoisons ce tourbillon de bruit, de monde, de vie. Nous apprenons à l'aimer et à découvrir ses trésors cachés, ses joueurs d'échecs, ses vendeurs ambulants, ses marchés, même ses marchés « d'alternative socialiste » qui vendent la même marchandise capitaliste que les autres.

Caracas, on aime.

La ville immense est séparée de la mer par une haute montagne, miraculeusement préservée de l'urbanisation par un décret qui en fait un parc national. D'ailleurs, c'est un bon point pour Chavez, qui a déclaré la gratuité de tous les parcs nationaux du pays. Nous partons à la conquête du parc Avila. Une fois en haut, sur la crête, la ville s'étale d'un côté, percée par les grattes-ciel. De l'autre, le bleue de la mer des Caraïbes nous saute à la figure. C'est calme, c'est beau. Difficile de croire que plus de 3 millions de personnes circulent en dessous.

Dans le métro bien organisé de Caracas, nous hallucions sur un panneau qui vante les mérites d'un satellite. Mais attention, pas n'importe quel satelite... le satellite « Bolivar ». Simon Bolivar, le « libertador » (libérateur) de l'amérique latine, le héros du peuple, venezuelien de son état, dont Chavez est complètement sous l'emprise, se décline sous toutes ses formes: république, aéroport, monnaie nationale, ponts, musées, plus haut sommet du pays, université, places, magasins en tout genre... et même un satellite! Oui mes amis, Simon Bolivar permet aux venezueliens des contrées reculées de communiquer avec le monde!!!

Retour dans les Andes

Au revoir François et Noris, mille mercis pour votre accueil! Nous refilons vers les Andes. Cette fois nous choisissons le village reculé de Los Nevados. Sur les prospectus touristiques, ça fait rêver, alors on y va.

Quatre heures de 4x4 sur une piste étroite, boueuse, avec un ravin..... ouh chuleta, si profond que tu ne vois même pas le fond... je ne vais pas dire que j'ai eu peur, mais un peu quand même. Et à la sortie d'un virage, il est là. Planté sur sa petite crète, à flanc de montagne... tout petit tout mignon.

En vrai, le village de los Nevados est encore plus joli que sur le papier. Pas de mauvaise surprise, on dirait un village de poupée mignature, perché à 2700m d'altitude.

On est herbergé dans la posada de Justina, tout en haut du village, avec la plus belle vue. Encore une fois je suis à cours de mots pour décrire l'endroit et la sensation que cela procure d'être en haut et de se sentir petit dans ce décors.

Nous sommes sur les flancs du Pico Bolivar (je vous l'avais dit!) et nous rêvons de le voir. Nous testons aussi ce fameux satellite Bolivar, qui permet aux habitants et aux touristes que nous sommes, de communiquer avec le monde, et d'utiliser internet gratos! C'est d'ailleurs très comique car jamais je n'avais eu à traduire un texte sur un défenseur venezuelien. Mon tout 1er texte sur des problèmes liés aux droits humains au Venezuela, aura été mis en ligne sur des ordinateurs gouvernementaux, aux frais de la république bolivarienne, Merci Simon!

Le lendemain, quand nous entamons notre ballade pour enfin voir le Pico Bolivar, nuages et pluie nous accompagnent, on ne voit rien... merci la saison des pluies. Frustration assurée, on est dégoûtés, on retourne en Colombie.

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